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Critique de « Dying »: Lars Eidinger porte le poids du drame familial profond et sombrement drôle de Matthias Glasner

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Lissy (Corinna Harfouch) est blottie par terre en chemise de nuit et tente d’appeler son fils. Ses jambes et sa chemise de nuit sont tachées de brun à cause de son incontinence nocturne régulière, mais c’est son mari qui l’inquiète : Gerd (Hans-Uwe Bauer) s’est encore promené dehors, ne sachant pas où il se trouve et ne portant pas de pantalon. Sa voisine est à la porte, insistant pour être utile, tandis que Lissy veut juste qu’elle écourte cette humiliation ; a-t-elle remarqué que même le téléphone est désormais barbouillé d’excréments ?

La vieillesse n’est pas une place pour les poules mouillées, comme l’a dit Bette Davis. La réponse habituelle est que c’est mieux que l’alternative, mais le long film captivant et par intermittence très drôle de Matthias Glasner remet cela en question. La vie, avant même que les débilités de l’âge ne deviennent son trait principal, est la véritable difficulté.

L’histoire de Glasner est une version d’une saga familiale traditionnelle, mais déconstruite pour devenir une série de chapitres qui se chevauchent sur les individus qui composent la famille. Le fait est que Lissy, Gerd, son fils Tom et sa sœur Ellen ne forment clairement pas une famille cohérente et, comme le révélera une séance de vérité sombre et humoristique entre Lissy et Tom, ne l’ont jamais vraiment fait. Lissy prend soin de Gerd de manière assez équitable, mais lorsqu’elle a une crise cardiaque et qu’il est placé dans une maison de retraite, ce qui apparaît sur son visage est son soulagement tacite de pouvoir se concentrer sur ses propres maux.

À ce stade, un nouveau chapitre est introduit qui sera centré sur Tom (Lars Eidinger), chef d’orchestre junior dans une autre ville : il travaille à Berlin, alors qu’ils sont à Hambourg. Tom est officiellement seul, mais s’est engagé à être le père remplaçant du nouveau bébé de son ancien partenaire. Il aide à accoucher de la petite Jessie au moment précis où sa mère l’appelle. « Dommage que ce ne soit pas le tien », dit Lissy avec aigreur.

Tom est occupé, comme il le dit, à diriger une nouvelle œuvre — intitulée «En train de mourir» – par son ami compositeur torturé Bernhard (Robert Gwisdek). Bernhard parle depuis 20 ans de se suicider ; Tom est l’ami qui reçoit ses appels désespérés de fin de soirée et qui supporte le poids de ses fréquents accès de rage. Il est moins indulgent envers sa sœur Ellen (Lilith Stangenberg) lorsqu’elle l’appelle ; c’est une ivrogne amoureuse de sa propre dissipation, une reine des bars qui chante avant de vomir par terre et se réveille régulièrement dans des pièces qu’elle ne reconnaît pas. « Appelle-moi », dit Tom à un moment donné, « quand tu n’as pas bu. »

L’un des grands plaisirs de ce film réside dans les contradictions de ses personnages : Tom est un aide-né, généreux et gentil, mais les femmes l’accusent d’avoir le cœur froid et, malgré les apparences, il sait qu’elles ont raison. La musique est son amour. Une séquence dans laquelle il dirige une répétition de la pièce « Dying » de Bernhard, montrant les visages ravis des musiciens de son orchestre de jeunes avant de revenir à l’expression de joie transportée d’Eidinger alors que le son se déverse vers son podium, est profondément émouvante d’une manière qui résiste analyse : voici la puissance et la beauté de l’art, une gloire solide au milieu de ce fouillis de griefs, de désirs et de vies instables.

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Glasner a l’oreille fine pour l’absurdité et l’humour sombre que l’on retrouve dans l’échec ; Lorsque Lissy admet à Tom qu’elle n’était pas seulement une mauvaise mère, mais aussi une mère abusive, son manque de gêne est hilarant en soi. Le fait qu’Ellen, ivre, soit infirmière dentaire est une autre blague, soulignée lorsqu’elle doit extraire la dent de son compagnon de beuverie dans les toilettes d’un bar, accrochant un pied contre le lavabo pour gagner de la traction alors qu’elle tire sur une paire de pinces de menuisier recyclées.

Certes, cela ne fonctionne pas toujours aussi bien : la dégénérescence d’Ellen peut sembler exagérée, voire ridicule. Qu’elle puisse conserver son emploi même après s’être effondrée sur un patient avec une perceuse dans la bouche défie toute croyance. Il en va de même pour l’idée selon laquelle Bernhard pourrait gifler les jeunes musiciens de la Philharmonie de Berlin sans que les RH ne provoquent l’enfer, défie toute croyance ; En train de mourir ne prétend jamais être du réalisme social, avec ses couleurs exacerbées et ses titres de chapitres entrelacés, mais à ces moments-là, on a l’impression qu’il se transforme en mélodrame.

Il est cependant éloigné du gouffre grâce à la force tranquille de la performance centrale d’Eidinger et à l’attention portée par le réalisateur et les autres acteurs aux détails de la vieillesse et de la dépendance ; chaque personnage sonne vrai, même si leur situation ne le est parfois pas. Et ces moments d’excès ont leur propre logique narrative. Rassembler autant de morts et de morts dans une seule histoire, aussi volumineuse soit-elle, est un formidable défi, mais Glasner gère sa vaste scène en permettant aux vagues d’émotions d’avancer puis de reculer ; son intensité est mesurée, entrecoupée de ces répits d’humour.

Et ainsi nous avons lutté à contre-courant, atteignant un point satisfaisant où Tom, au moins, semble avoir atteint une sorte de bonheur – du moins jusqu’à ce que la mort vienne le réclamer, comme c’est le cas pour nous tous. Ce n’est même pas une pensée lugubre. Sous un certain angle, cela peut être vu comme un petit rire.

Titre: En train de mourir
Festival: Berlin (Concours)
Agent de ventes: Usine d’allumettes
Réalisateur/scénariste : Matthias Glasner
Casting: Lars Eidinger, Corinna Harfouch, Lilith Stangerberg, Hans-Uwe Bauer, Ronald Zehrfeld
Durée de fonctionnement : 3 heures

Content Source: deadline.com

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