Alors qu’Anatomie d’une chute est en lice pour de nombreux nouveaux trophées, la nouvelle ministre de la Culture évoque la «liberté d’expression» des artistes.
Les cinq nominations aux Oscars d’Anatomie d’une chute ont-elles joué dans l’évolution du discours ? L’exécutif a en tout cas sensiblement changé de ton vis-à-vis de la réalisatrice Justine Triet qui vole de trophée en trophée. À Cannes, en recevant la palme d’or en 2023, elle avait fustigé la «marchandisation de la culture que le gouvernement néolibéral défend». Propos que la majorité macroniste avait peu apprécié et que l’ancienne ministre de la Culture, Rima Abdul Malak, avait qualifié, poliment, d’«ingrat et injuste».
À quelques semaines des cérémonies des César et des Oscars – et des potentiels communiqués saluant un nouveau triomphe pour le cinéma français -, la nouvelle locataire de la rue de Valois a opéré un virage à 180 degrés en encensant ce film qui dissèque les rapports de domination au sein du couple. «La palme d’or, ce n’est pas rien, s’est exclamée Rachida Dati au micro de France Inter mercredi. Ce film m’a bouleversée. C’est un combat que je mène depuis que j’ai l’âge de dix ans : j’ai vécu dans de la violence tout le temps. Ce qui est nouveau et primordial dans le film de Justine Triet , c’est le point de vue de l’enfant.»
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C’est sa liberté d’expression. Elle est artiste. Elle en a encore plus le droit
L’ancienne ministre de la Justice de Nicolas Sarkozy se montre pleine de magnanimité sur le discours anti-gouvernemental prononcé par Justine Triet. «C’est sa liberté d’expression. Elle est artiste. Elle en a encore plus le droit». Pour rappel, la réalisatrice avait accusé le gouvernement d’Emmanuel Macron «de casser l’exception culturelle française, cette même exception culturelle sans laquelle (elle) ne serai(t) pas là aujourd’hui». La cinéaste s’était également fait le relais de l’opposition à la réforme des retraites, «une protestation historique extrêmement puissante et unanime, niée de façon choquante».
Piqué au vif, l’Élysée n’avait envoyé aucun message de félicitations à Justine Triet. Le silence radio a duré jusqu’en janvier et le triomphe d’Anatomie d’une chute aux Golden Globes. Impossible de bouder davantage alors qu’il était clair que le drame judiciaire avait de bonnes chances de percer dans les catégories générales Oscars.
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Certains ont vu dans le discours offensif de Justine Triet les raisons de la mise à l’écart du film par le CNC. Le comité, en charge de sélectionner le film français candidat à l’Oscar du meilleur film international, a préféré la fresque culinaire La passion de Dodin Bouffant à la palme d’or. La suite est connue. Les votants des Oscars n’ont pas daigné nommer la recette du pot-au-feu de Tran Anh Hung, mais ont fait un triomphe à Anatomie d’une chute, qui peut prétendre le 10 mars prochain à cinq statuettes, dont les plus prestigieuses de meilleur film, scénario original et mise en scène.
Un exploit qu’applaudissait déjà Rachida Dati, la semaine dernière. «Fière pour la France, patrie historique du cinéma, et pour notre rayonnement culturel, de la nomination aux #Oscars d’Anatomie d’une chute et de sa réalisatrice Justine TRIET», écrivait-elle sur le réseau social X.
Les deux femmes pourront échanger de vive voix, le 23 février, lors de la cérémonie des César. Avec 11 nominations, Anatomie d’une chute est le grand favori de la soirée, avec la dystopie Le Règne animal.
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