Critique de « La plus précieuse des cargaisons » : la fable animée sur l’Holocauste de Michel Hazanavicius trace une ligne fine – Festival de Cannes

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Si un film d’animation arrive en Compétition à Cannes, il y a de fortes chances que ce ne soit pas un autre Bambi — même si, si cela se produisait aujourd’hui, la fusillade traumatisante de la mère de Bambi chatouillerait certainement le comité de sélection. Non, Cannes préfère que son animation soit biaisée vers adultescomme la science-fiction surréaliste de René Lalou Planète fantastique (1973), la suite torride de Robert Taylor Les neuf vies de Fritz le chat (1974) ou le docudrame de guerre d’Ari Folman Valse avec Bashir (2008). Et avec La plus précieuse des cargaisonsacteur devenu réalisateur et désormais graphiste Michel Hazanavicius s’est tourné vers le sujet le plus controversé qu’il soit possible d’aborder à la plume : l’Holocauste.

Cinq longues années de préparation, l’adaptation par Hazanavicius du roman 2019 de Jean-Claude Grumberg arrive à Cannes deux ans après la mort de son narrateur, Jean-Louis Trintignant, et, malheureusement, un an après les débuts du film oscarisé de Jonathan Glazer. La zone d’intérêt. Rien qu’en termes de technique, le film de Glazer est difficile à suivre, et même si les deux films ne pourraient pas être plus différents, il y a des moments où ces différences soulèvent de légitimes questions de goût. La controverse, bien sûr, n’est pas nouvelle chaque fois que l’Holocauste est dramatisé – comme on le sait : Shoah Le réalisateur Claude Lanzmann a même contesté la façon dont Steven Spielberg avait traité le sujet dans la liste de Schindler.

Pour mémoire, le film de Hazanavicius est impeccablement sincère dans ses motivations et sa réalisation, mais la question de montrer l’impensable demeure. Tout en étant respectueux, Hazanavicius se montre admirablement libre de tout sentiment, et la beauté épurée de son style visuel est une ironie délibérée qui entrera en jeu à la toute fin. Même le narrateur est d’accord sur ce point, promettant, pour mémoire, qu’il ne s’agira pas d’une rediffusion de Petit Poucet (une référence littéraire française du XVIIe siècle qui ne se traduit pas très bien). «Je déteste ce conte de fées ridicule», dit Harrumph Trintignant, dans ce grognement gaulois familier.

Illustrée de manière claire et simple, l’histoire s’ouvre lors d’un hiver enneigé dans les bois de France, où un pauvre bûcheron vit avec sa femme. Le grondement des trains remplit l’air et la communauté locale sait exactement qui se trouve à l’intérieur et où ils sont emmenés : au camp de concentration d’Auschwitz. Un jour, la femme du bûcheron entend du bruit ; Au passage d’un train, un bébé est jeté dans la neige et elle le trouve enveloppé dans une couverture, gargouillant de contentement. Elle le ramène chez elle et le bûcheron sait immédiatement d’où vient l’enfant. Il ne veut rien avoir à faire avec cela, et ses menaces de s’en débarrasser sont terriblement réelles.

Comme il le sait, les Juifs ne sont pas populaires auprès de la communauté locale – tous les bûcherons – qui pensent qu’ils sont une race « sans cœur ». « Ils ont tué Dieu! » ils disent. « Ce sont des voleurs ! » Le bûcheron le croit également, refusant même de laisser l’enfant jouer avec son chien, mais d’une manière ou d’une autre, elle se met sous sa peau. Lorsque le printemps arrive, le bûcheron entend son cœur battre partout où il va et commence à se disputer avec les autres hommes du village alors que leur antisémitisme de la foule atteint son paroxysme. « Les sans-cœur ont un cœur », insiste-t-il, une hérésie qui ne restera pas impunie.

Après avoir établi le sort du bûcheron et de sa femme, le film se tourne vers le père du bébé, montrant le désespoir qui l’a poussé à jeter son enfant dans la nature et ce qui l’attend à Auschwitz. C’est dans ces scènes que le film est le plus nauséabond, principalement dans un montage inconfortable de visages grotesques et hurlants. Glazer a utilisé le son de manière exquise pour transmettre un bien meilleur effet, plaçant la partition troublante de Mica Levy au premier plan comme une sorte d’ouverture infernale. C’est un moment bref, mais choquant, et le film ne perdrait pas un instant sans lui.

Au rythme rapide de 81 minutes, tout se termine très rapidement, et c’est tout à l’honneur d’Hazanavicius de ne pas associer longueur et importance : la puissance de son film tient en grande partie à sa clarté et à sa simplicité. Il fait également un excellent usage de l’animation pour traduire au cinéma l’utilisation postmoderne du conte de fées par Grumberg. Dans le film, comme dans le livre, il y a là une auto-réflexivité, une auto-réflexivité qui vous fait voir le caractère artificiel de son scénario bien trop improbable : La plus précieuse des cargaisons est un rappel amical que la vie n’est pas une fiction et que des choses bien plus importantes peuvent arriver. chemin au-delà de la croyance.

Content Source: deadline.com

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