Entre réinterprétations de pièces vintage et modèles atemporels, les horlogers de Watches and Wonders affectionnent les styles traversant le temps. Une tendance qui plaira sûrement au public, qui peut visiter le salon ce week-end.
Faut-il encore s’acheter une montre classique neuve ? En ces temps de passion pour les pièces vintage, nombre d’amateurs de belles montres se posent la question. Il faut bien avouer qu’il y a de quoi hésiter, tiraillé entre la tentation de s’offrir une montre ancienne sur le marché de la seconde main si dynamique et des rêves horlogers souvent inaccessibles, notamment en raison de la disponibilité aléatoire des pièces d’exception et de la barrière des prix. À Genève, les maisons horlogères profitent de Watches and Wonders pour rassurer cette clientèle essentielle, qui sera présente ce week-end puisque le salon est ouvert au public jusqu’au 15 avril. Même si, le temps du salon, la galaxie des montres traditionnelles est un peu éclipsée par les étoiles filantes que sont les pièces à complications, elles ne demeurent pas totalement dans l’ombre de ces soleils puisqu’elles profitent, par répercussion, des lumières de la créativité. Les métiers d’art, par exemple, ne cessent d’attirer les collectionneurs et les amateurs avisés, notamment parce qu’ils permettent aux maisons de parler d’autre chose que de technique.
Une balade à laquelle invite Czapek avec sa montre Promenade Guilloché Soleil, dont la déclinaison Ivoire présentée à Genève attire particulièrement le regard. L’originalité du motif soleillé, gravé à la main dans les ateliers cadranniers de Metalem sous la direction de Kari Voutilainen, réside dans son décentrage autour du cadran de petite seconde, placé à 4 h 30. Justement proportionné, son boîtier de 38 mm de diamètre et de seulement 10,8 mm d’épaisseur est en acier. Accueillant les visiteurs sur son stand en nœud papillon et complet bleu, son président, Xavier de Roquemaurel, revendique une approche esthétisante : « Avec les montres comme avec les gens, le cadran – ou le visage – révèle une grande partie du caractère dès la première rencontre. Le choix du modèle que nous portons révèle un peu de notre âme. Nous aimons jouer avec les couleurs, les techniques et les matériaux. Promenade n’est donc pas seulement un instrument de chronométrage mais aussi une toile d’expression créative. »
Une intention que partage manifestement Rolex avec sa nouvelle Perpetual 1908. L’exécution exemplaire du guillochage de son cadran vient justement rappeler que la marque à la couronne n’excelle pas uniquement pour concevoir des montres professionnelles ou des plongeuses. La courbe en rosace du motif grain de riz est centrée sur le compteur de petite seconde à 6 heures afin d’encourager la diffusion de la lumière. Un décor complété par l’élégant filet sauté de la graduation de la minuterie. Distinguée mais pas guindée avec sa lunette cannelée, cette Rolex classique en platine n’en est pas moins moderne avec son calibre automatique 7140, inauguré l’an dernier, disposant notamment de l’échappement Chronergy en nickel phosphore.
Les matériaux contemporains ont désormais leurs lettres de noblesse et ne sont pas exclusivement dédiés aux montres sportives, comme en témoigne Grand Seiko avec sa montre Evolution 9 à remontage manuel référence SLGW003 réalisée en Brilliant Hard Titanium, un alliage plus brillant que le titane traditionnel développé par la manufacture japonaise. Inaugurée en 1967 avec le célèbre modèle 44GS, la ligne est fonctionnelle et sobre. « Plusieurs aspects du design de la montre ont été revisités : les index saillants et rainurés ont été affinés et allongés, tandis que les cornes multifacettées sont désormais plus étroites et présentent une surface réduite, précise l’horloger japonais. Le centre de gravité de la montre a été abaissé afin de garantir le confort et la stabilité qui font la renommée du style Evolution 9 de Grand Seiko. » Si le titane, très léger, est résistant aux éraflures et insensible à la corrosion, il peut être travaillé pour des finitions brillantes, notamment par le polissage Zaratsu, technique favorite des artisans du Grand Seiko Studio Shizukuishi, où sont produites toutes les montres mécaniques de la marque. Une manufacture située dans le nord du Japon entourée de bouleaux blancs. Leur écorce tendre est l’inspiration naturaliste du motif texturé du cadran de cette montre. Dans d’autres catégories, les visiteurs de Watches and Wonders se régaleront de découvrir plusieurs garde-temps com plexes porteurs d’indications calendaires ou de phases de lune.
PASSER DU RÊVE À LA RÉALITÉ
Revenant sur terre, ils pourront aisément passer du rêve à la réalité en considérant les évolutions de la gamme chez Frédérique Constant. Outre la nouvelle Classic Moonphase Date Manufacture, inaugurant le nouveau mouvement maison de Frédérique Constant, le calibre Manufacture FC-716, doté d’un barillet inédit assurant trois jours de réserve de marche, les esthètes regarderont avec intérêt le modèle Classic Date Manufacture au cadran saumon. Une tonalité revenue à la mode, qui évoque aussi les cadrans « tropicaux » tellement prisés des amateurs de vintage. Cette montre au goût du jour joue donc habilement sur les deux tableaux, avec en prime la fiabilité d’un mouvement actuel.
Telle est aussi la ligne directrice de Raymond Weil. L’entreprise genevoise indépendante se repositionne de manière stratégique sur le créneau des pièces intemporelles avec un dessin bien proportionné, récemment primé par le prestigieux grand prix d’horlogerie de Genève (GPHG). Une famille de montres réussissant le mariage des codes de l’âge d’or des années 1940, notamment le cadran à secteur très lisible et parfaitement dessiné, avec les dimensions actuelles permettant d’embarquer des mouvements automatiques à la robustesse éprouvée et assurant une bonne lisibilité. Un souci pris en compte avec sérieux par Elie Bernheim, directeur général de l’entreprise familiale : « Nous avons repensé nos modèles en favorisant une approche néoclassique pour la gamme Millésime. Ainsi, pour la phase de lune, nous avons non seulement souhaité une lune incarnée, mais aussi une belle luminescence dans l’obscurité, selon les standards actuels. »
Bell & Ross, pour sa part, règle le curseur vers les années 1970 et 1980, avec une déclinaison bicolore or et acier de sa BR 05 Chrono. Chic et décontractée, cette montre au bracelet intégré, dans l’air du temps, s’impose déjà comme une classique. En bicolore, elle s’approprie un code esthétique qui n’est plus désuet mais embrasse au contraire un imaginaire riche de figures flamboyantes.
De son côté, Zenith, à l’occasion du grand lancement de sa nouvelle plongeuse, la Defy Extreme Diver, fait remonter à la surface de ses riches archives le modèle d’origine, datant de 1969. C’était alors la première montre de plongée de la manufacture du Locle et… la seule de ses collections jusqu’à maintenant. Les nouvelles références, étanches à 1 969 pieds (soit 600 m), s’autorisent du titane, assument un généreux diamètre de 42,5 mm, embarquent le calibre automatique El Primero 3620 SC à haute fréquence (5Hz), et n’échappent pas, dans la panoplie de leurs bracelets interchangeables, à une attache fabriquée à partir de filets de pêche recyclés. Les puristes préféreront le chronographe Defy Skyline ou la Defy Revival A3648, qui conserve le boîtier facetté initial de 37 mm et opte pour le mouvement Elite 670 automatique. Sa lunette tournante unidirectionnelle est en acier, mais avec un insert en saphir teinté orange, allant de pair avec le cadran noir et orange. Les montres classiques reprennent vraiment des couleurs.
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