Sophie Grégoire a fait ses devoirs. Elle nous confirme avoir préparé six pages de questions pour Janette Bertrand, qu’elle interviewera dans quelques instants, pour un total de 20 minutes. Excessif ? Peut-être. Mais l’ancienne première dame du Canada aime son sujet. « Oui, je suis une passionnée. Oui, je voudrais plus de temps avec elle, mais je suis aussi quelqu’un qui sait respecter un décompte », précise-t-elle, en recevant quelques retouches de maquillage.
Sophie Grégoire n’est pas l’unique personnalité qui profitera d’un moment en tête à tête avec Janette Bertrand le soir de notre passage à l’enregistrement d’un nouveau Pour une fois. Ricardo Larrivée, Élise Guilbault et Véronique Cloutier défileront également devant l’écrivaine de 98 ans. Et cette dernière n’a aucune idée des surprises qui l’attendent.
Produit par Urbania (L’air d’aller, La fin des faibles), ce rendez-vous hebdomadaire propose des entrevues « inversées ». Chaque semaine, un invité répond tour à tour aux questions de quatre animateurs surprises, qu’il connaît beaucoup, peu ou… pas du tout.
« Peut-être qu’elle ne sait pas je suis qui ! », s’exclame d’ailleurs Sophie Grégoire à notre arrivée au Bakus, une salle de réception dans l’arrondissement du Sud-Ouest à Montréal, vers 16 h, alors que l’équipe de l’émission donne les dernières consignes aux intervieweurs secrets.
1/9
Seule Véronique Cloutier, en ondes comme d’habitude à Rouge FM jusqu’à 18 h, manque cette réunion qui rassemble une dizaine de personnes. Personne n’a l’air de trop s’en faire. Il paraît qu’elle a l’habitude des plateaux de télévision.
Les caméras n’ont plus de secret pour Élise Guilbault non plus, mais contrairement aux autres, elle n’a jamais été celle qui pose les questions. En révisant ses notes, alors qu’on entend la foule investir le studio, la comédienne paraît néanmoins décontractée.
Dieu sait que j’ai souvent passé 20 minutes à parler avec Janette. Et ça coulait. Mais dans un contexte comme celui-ci, on espère être un peu original. Parce que beaucoup de choses ont été dites sur elle…
Élise Guilbault
De son côté, Ricardo s’avoue « un peu » nerveux. On comprend qu’il connaît bien – et personnellement – l’interviewée. Malgré tout, il sent le stress monter. « Je trouve ça pire quand c’est quelqu’un que tu aimes beaucoup. Je répétais mes questions en prenant ma douche ce matin ! »
Pari réussi
Pour une fois est officiellement entrée en ondes en septembre dernier, après avoir fait l’objet d’un épisode test en janvier. Télé-Québec avait testé la température de l’eau en présentant une émission durant laquelle Martin Matte s’était laissé surprendre par Lydia Bouchard, Dany Laferrière, Patrice Robitaille et Arnaud Soly.
« On voulait tester un nouveau format, quelque chose qu’on n’avait jamais vu ailleurs, explique Nadine Dufour, vice-présidente des contenus du diffuseur. À Télé-Québec, on aime faire preuve d’audace. Et cette formule, qui renverse les rôles, nous permet de montrer des aspects des gens qu’on n’a pas vus souvent. »
Nadine Dufour salue la générosité des participants à Pour une fois. Non seulement parce que plusieurs d’entre eux n’ont jamais mené d’entrevue, mais aussi parce qu’ils s’y préparent sérieusement, des semaines à l’avance. « Ils doivent lire un dossier de recherche, se faire une tête, choisir leur angle… C’est beaucoup de travail. Mais quand ils ont fini, ils sont conquis. »
La productrice au contenu de Pour une fois, Mireille Blouin, confirme ces dires.
Après leur passage, les artistes m’écrivent pour dire qu’ils ont passé une belle soirée. Recevoir un petit message de remerciements de Louis Morissette, c’est galvanisant. Les gens sont contents pour vrai !
Mireille Blouin, productrice au contenu de l’émission
L’auditoire de Télé-Québec est également satisfait. Dans sa case horaire originale du samedi soir à 20 h, Pour une fois est l’émission régulière la plus populaire du réseau, avec une moyenne de 230 000 téléspectateurs, pour une part de marché de 9,7 %, révèlent les données confirmées de Numéris. Voilà pourquoi la chaîne a récemment commandé une deuxième saison.
« Je m’en fais énormément parler, souligne la productrice Annie Bourdeau. Les gens embarquent. »
Et c’est parti !
18 h 10. L’enregistrement doit bientôt commencer. Janette Bertrand fait son entrée en studio et prend place dans l’un des deux fauteuils disposés au centre du public. « J’ai hâte que ça commence ! », lance-t-elle, pendant qu’on ajuste l’éclairage.
Janette Bertrand insiste : elle ignore qui viendra s’asseoir devant elle. Avec humour, elle énumère quelques possibilités… « Il m’est passé une idée folle : ils ont déterré Macaire ! » (Macaire était son chien dans Quelle famille !, une série diffusée de 1969 à 1974 à Radio-Canada.)
La première à s’exécuter est Élise Guilbault, que Janette Bertrand accueille, comme d’habitude, avec un baiser sur la bouche et quelques tapes sur les fesses. Malgré l’entrevue légèrement décousue, la complicité entre les deux femmes est palpable.
Le public est particulièrement attentif lorsque la comédienne raconte comment, au début des années 1990, avant d’interpréter une médecin dans Avec un grand A : missionnaires du sida, la scénariste l’avait amenée visiter un mouroir pour hommes ayant contracté la maladie.
Sophie Grégoire succède à l’actrice avec une série de questions qui mettent son interlocutrice au défi, alors que Ricardo choisit d’y aller avec une discussion plus intimiste. Après l’entrevue durant laquelle on pouvait entendre une mouche voler, une spectatrice non loin lance : « J’ai eu le motton tout le long ! »
Dernière intervieweuse de la soirée, Véronique Cloutier lance la conversation avec l’une des meilleures questions de l’émission : « Tu as déniaisé le Québec, mais qui t’as déniaisée, toi ? » Janette Bertrand se livre sans pudeur à celle qui ne l’avait jamais interviewée, allant même jusqu’à décrire son appétit sexuel à l’aube d’être centenaire.
« J’ai trouvé ça extraordinaire ! »
21 h 10. L’enregistrement est terminé. En coulisses, on décante bruyamment les dernières heures. Véronique Cloutier affirme avoir beaucoup aimé son expérience. En attendant son tour, elle pouvait suivre, avec ses collègues intervieweurs, les autres entrevues devant un énorme téléviseur. « C’est comme écouter la télé en gang et passer des commentaires ! J’adore ça ! »
L’animatrice connaissait évidemment le format de l’émission. « Ça nous sort des entrevues traditionnelles, où c’est juste une personne qui vient ploguer ses affaires. »
Quant à Janette Bertrand, elle rappelle son passage précédent à l’émission, quelques mois plus tôt, comme intervieweuse pour Éric Bruneau. Son passage comme invitée semble l’avoir comblée… et quelque peu fatiguée, compte tenu du bombardement de questions qu’elle vient de subir. « J’ai trouvé ça extraordinaire ! C’est un concept fantastique », souligne-t-elle avant de s’éclipser.
Télé-Québec présente Pour une fois le samedi à 20 h (en rappel le lundi à 21 h). Avec Louis Morissette le 13 janvier, Janette Bertrand le 20 janvier et Julie Le Breton le 27 janvier.
Content Source: www.lapresse.ca