Les médias ont-ils annoncé trop rapidement lundi soir que le gouvernement serait formé par le Parti libéral ? Une heure après l’annonce, l’écart avec les conservateurs s’est momentanément réduit. Le parti de Pierre Poilievre est même passé à deux sièges à peine de prendre la tête peu après 23 h 15.
« Quand on a dit que le prochain gouvernement allait être libéral, on était très confiants. Mais quand l’écart s’est rétréci, c’est certain qu’on a eu une petite frousse », reconnaît Jonathan Trudel, qui chapeautait le bureau de décision de Radio-Canada lundi soir.
Avec le recul, il peut cependant affirmer que non, les médias n’ont pas été trop rapides à prédire la couleur du gouvernement lundi soir, une quarantaine de minutes après la fermeture des bureaux de vote dans la plupart des provinces.
Car si en studio et en régie, le stress était palpable durant ce court moment où les libéraux et les conservateurs ont été presque au coude-à-coude, les analystes du bureau de décision de Radio-Canada, eux, n’ont jamais craint que la tendance s’inverse réellement.
Ce sont eux qui décortiquent dans le détail les résultats dans chaque circonscription avant de déclarer un candidat élu selon une méthodologie bien précise.
Ils savaient que des boîtes de vote par anticipation, largement favorables aux libéraux, n’étaient pas encore dépouillées. D’ailleurs, l’écart s’est rapidement creusé de nouveau entre les libéraux et les conservateurs un peu avant minuit.
« C’est fascinant, ce qui s’est passé avec le vote par anticipation. Notre hypothèse, c’est que si les élections avaient eu lieu une semaine avant, le résultat aurait été complètement différent. La tendance a l’air d’avoir complètement changé dans la dernière semaine », s’étonne Jonathan Trudel.
À certains endroits, des conservateurs qui menaient en fin de soirée, parfois par environ 1000 voix, ce qui est suffisant habituellement pour déclarer un candidat élu, ont finalement mordu la poussière une fois que tout le vote par anticipation a été comptabilisé par Élections Canada.
Pas de moment « Bruno Marchand »
En 2021, les médias avaient déclaré élue à la mairie de Québec la mauvaise personne, Marie-Josée Savard, car celle-ci disposait d’une avance confortable durant une bonne partie de la soirée. En 2007, Jean Charest avait été donné défait dans sa circonscription par Radio-Canada, mais le dépouillement du vote par anticipation à la fin lui avait permis de gagner. Rien de tel, cette fois-ci, malgré les grandes fluctuations durant le décompte.
Oui, le vote par anticipation rend plus difficiles les prédictions. C’est un élément dont il faut tenir compte, et qui n’était pas vraiment un enjeu avant. Mais notre modèle statistique reste très fiable, comme on a pu le prouver hier.
Jean-Philippe Pineault, directeur général de l’information de Bell Média au Québec
Noovo et CTV, les deux réseaux de télévision de Bell, ont été les premiers, à 22 h 07, à prédire que le prochain gouvernement allait être libéral. CBC/Radio-Canada a suivi à 22 h 10. TVA, qui a décliné notre demande d’entrevue, l’a annoncé à 22 h 13.
Contrairement aux autres réseaux, CBC/Radio-Canada n’a jamais annoncé officiellement durant la soirée électorale de lundi à mardi que le prochain gouvernement libéral allait être minoritaire. Le diffuseur public explique qu’une possibilité subsistait jusqu’à mardi dans la journée que les libéraux atteignent le chiffre magique de 172 sièges, encore une fois à cause du vote par anticipation qui restait à dépouiller dans certaines circonscriptions.
Rectificatif
Dans une première version de ce texte, une citation sur le vote par anticipation a été attribuée à tort à Luce Julien, directrice de l’information de Radio-Canada. Elle a plutôt été dite par Jonathan Trudel. Nos excuses.
Content Source: www.lapresse.ca